E ncore un entretien. Quelle plaie. Mais là on a pas le choix, on s’est fait lâchés un peu en dernière minute. L’annonce dans le journal a bien fonctionné, on a reçu un nombre impressionnant de candidatures. Ca nous a pris un temps fou pour tout trier, avec Henry, mais on a réduit le nombre à une vingtaine environ. Reste plus qu’a tous les recevoir, et comme souvent, c’est moi qui m’en charge. Oui, il y a un service des ressources humaines, mais je préfère m’occuper moi-même de l’embauche de mes employés. Comme ça je suis certaine qu’ils me conviennent et ça me permet de connaître un minimum ceux qui travaillent pour moi.

Normalement, aujourd’hui est le dernier jour de ces entretiens. Il ne m’en reste que trois, et après, il ne me restera plus qu’à en discuter avec Henry et prendre la décision finale. De tous ceux que j’ai vu, aucun ne m’a véritablement tapé dans l’œil, mais deux me semblent relativement aptes à remplir le poste pour lequel ils ont postulé. Les autres m’ont laissé relativement sceptique. Le premier candidat arrive d’ici une demi-heure, ce qui me laisse amplement le temps de relire les trois dossiers. D’un point de vu des compétences, le dernier me semble le plus envisageable, mais quelque chose dans sa lettre de motivation me dérange, je ne sais pas quoi, mais je crains de ne pas l’apprécier beaucoup. Bon, c’est l’heure. Je signale donc à ma secrétaire de faire entrer le premier, et un jeune homme entre. Il doit avoir une vingtaine d’années, pas plus. Vingt-deux d’après son CV. Ses compétences sont intéressantes, mais il n’a pas encore l’expérience nécessaire pour un poste de cette envergure. Je ne pense pas qu’il aura les épaules pour. Mais je vais le garder sous le coude, au cas où j’aurais quelque chose de plus adapté à lui proposer.

Après son départ, je m’accorde quelques minutes pour m’installer, et ma secrétaire m’envoie le second. Il doit avoir dans les quarante-cinq ans, et semble déjà plus assuré, sans pour autant paraître trop sûr de lui. Plus engageant, en tout cas, il se présente dès son entrée. Je lui tends la main. Margaret Kenton, enchantée. Je vous en prie, prenez place. Je m’installe derrière mon bureau. Il semble un peu nerveux. C’est surprenant pour un ancien militaire, mais après tout, il n’a sûrement pas beaucoup d’expérience en ce qui concerne les entretiens d’embauche. Commençons par les présentations. Parlez-moi un peu de vous et de votre parcours jusqu’à aujourd’hui. Oui je sais,  je peux regarder le CV, et je l’ai fais, mais je demande toujours ça des potentiels futurs employés. Ca permet d’avoir plus de détails, tout en permettant au candidat de s’exprimer sur un sujet qu’il maîtrise un minimum. Et souvent ça les détends. Je lui adresse un sourire qui se veut encourageant, prête à écouter ce qu’il a à me dire.